Réflexion personnelle à propos de la : « la souffrance de la plante favorise la graine ou le fruit » … (discussion lors de la journée du groupe sol du 22 avril)
Lors de la journée du groupe sol du 22 avril 2006, une discussion fort intéressante a porté sur la « souffrance des plantes », qui bien gérée, permet une meilleure mise à fruit.
C’est en effet un phénomène bien connu des producteurs de fruits, mais aussi de semences légumières que physiologiquement, chez les plantes, on constate qu’une nutrition trop riche, en particulier en azote et en eau, lors de la phase végétative pour les légumes, et avant floraison sur les arbres, a tendance à provoquer une mauvaise mise à fruit, un retard de celle-ci, et favorise plutôt la pousse du bois, ou de la feuille. C’est-à-dire favorise l’épanouissement de l’individu plutôt que sa descendance. Une plante surfertilisée en azote fait de belles feuilles, bien larges, avec une couleur verte plus prononcé …, ou fait du bois pour un arbre, au détriment des fleurs, graines et fruits, c’est à dire de la descendance. C’est intéressant pour la production de légumes de consommation par exemple, mais pas pour la production de semences et de fruits.
Inversement une alimentation légèrement déficitaire en éléments minéraux, en azote en particulier, en eau également, ou un bref coup de chaleur au bon moment, favorise la mise à fleurs, et donc à fruit d’une plante ou d’un arbre. D’où le constat qu’ une légère « souffrance » de la plante favorise la descendance de l’individu, la survie de l’espèce, plutôt que l’épanouissement de l’individu. Attention, la « souffrance » du végétal doit être légère, car en conditions de graves carences, d’excès de chaleur prolongé, une alimentation carrément insuffisante ne permet plus à l’individu de croître et se développer normalement, et donc d’élaborer la graine et le fruit. Pour les arbres fruitiers, une carence trop forte après floraison(= « souffrance ») provoque la chute physiologique des jeunes fruits, ceux cin’arriveront pas à maturité.
Il a été signalé également le risque d’avortement pour les vaches laitières dont l’alimentation azotée (taux d’urée dans le sang) était trop riche ou mal gérée.
Ces observations ont évidemment des conséquences pour la gestion de la fertilisation et de l’irrigation chez ces producteurs.
Cette discussion m’amène aux réflexions suivantes :
Ne pourrait-on étendre cette observation chez les humains ? :
En effet, on constate que les peuples les mieux nourris, les plus « riches », sont aussi les moins prolifiques. A tel point qu’aujourd’hui, la pérennité de ces peuples est menacée à relativement brève échéance. Ce sont aussi ceux où lesquels la venue des enfants est la plus tardive chez les couples (le fruit est retardé …) Exemples de l’Allemagne, et de la plupart des pays occidentaux (y compris la France) dont le taux de natalité est trop faible et ne permet pas le renouvellement des générations.
Inversement les pays dits « pauvres » ou en voie de développement (mais pas dans la vraie misère) ont encore un taux de natalité qui leur permet une pérennité. Il en est de même des familles à l’intérieur d’un pays ou d’une nation. C’est plutôt chez les familles dites pauvres que l’on constate une descendance nombreuse. Et c’est chez les familles les plus aisées que l’on constate le moins d’enfants. (* 1)
Pour mémoire, la baisse de la natalité a commencé en France dès le XVIIIe siècle, d’abord chez les nobles et les bourgeois. Les philosophes des « Lumières » considéraient que enfanter est comme une faute de la part d’une jeune femme sensée et ,s’il lui arrive de concevoir malgré les précautions prises, Sade préconise de détruire le fruit de l’union. Le même Sade qui considére que la cruauté n’est que l’expression naturelle de la vie qui n’a pas encore été déformée par l’éducation.(* 2) .
N’ y aurait pas là une loi générale de la vie, d’abord d’ordre physiologique (mise à fruit des arbres) chez les végétaux et les animaux, mais aussi d’un autre niveau social, voire spirituel chez les humains ?
Il y a certainement un côté, une cause purement physiologique ou biologique : l’excès de nourriture, et en particulier de matières azotées (viandes dont la consommation s’est très fortement accrue au XXe siècle, ) surcharge le corps, qui gaspille de l’énergie, et les mécanismes permettant la reproduction s’en trouvent perturbés. C’est peut-être une des causes (*3) de l’augmentation des cas de stérilité physiologique décelée paraît-il chez les occidentaux, mais certainement pas la seule, et en n’oubliant pas qu’il y en a toujours eu.
Schématiquement, on peut distinguer trois niveaux d’alimentation :
1) Carences trop graves : besoins physiologiques non satisfaits : impossibilité pour l’individu de survivre et d’assurer une descendance : cela s’appelle la misère chez les humains
2) Besoins physiologiques satisfaits, sans excédents (sans luxe !), permettant à l’individu de mettre son énergie (ainsi que sa volonté, son temps chez les humains) pour assurer une descendance et la pérennité de l’espèce : cela s’appelle la pauvreté chez les humains, ce n’est pas la misère.
Ou encore la sobriété, c’est à dire la quantité et la qualité juste suffisantes pour mener au mieux la vie que l’on a choisi.
3) Individus consommant au delà de leurs besoins physiologiques, plus que satisfaits, engendrant le gaspillage, la perte d’énergie : cela s’appelle le luxe chez les humains
Au delà de l’aspect alimentaire ou nutritif, il y a aussi me semble-t-il un aspect supérieur, spirituel chez les humains, nous qui sommes à l’image de Dieu : Les personnes qui ne pensent qu’à elles-mêmes, qui cherchent systématiquement leur épanouissement individuel (et pas qu’alimentaire évidemment) le font au détriment de la possibilité d’avoir et d’élever des enfants. La période la grossesse et de l’enfantement pour les mères, puis l’éducation des enfants pour les deux parents prend de l’énergie, du temps, mobilisent des ressources qui ne seront plus consacrées au bon plaisir des individus, mais aux nécessités imposées par l’éducation des enfants… La grossesse est une période éprouvante pour les femmes, et beaucoup craignent (à tord d’ailleurs) que leur corps ne perde de la « sveltesse ». Quant aux hommes, ils vont devoir travailler un peu plus pour nourrir femme et enfants, le temps consacré aux loisirs, (même sains) va diminuer, … Le couple, lorsque les enfants arrivent, va devoir moins partir en vacances, aller au cinéma, sortir avec les copains, … D’un strict point de vue matériel et comptable, la venue d’enfants est une charge. C’est une réalité que connaissent tous ceux qui ont des enfants, en particulier ceux qui en ont beaucoup. Evidemment, nous nous savons que les joies liées à la venue des enfants sont incomparables face à ces mesquineries matérielles. Néanmoins cette attitude d’égoisme à la venue des enfants est une constante des êtres humains, plus ou moins marquée selon les personnes et les cultures.
Les hommes ou les femmes qui veulent « profiter » de leur vie, en jouir au maximum, par les moyens permis aujourd’hui dans la société (travail « épanouissant », voyages, activités diverses, …) , le peuvent, mais nécessairement ne pourront avoir ne serait-ce que le temps à consacrer à l’éducation des enfants. Ou alors les feront élever par d’autres, mais seraient-ce encore leurs enfants ? L’hédonisme, le culte du corps parfait, le souci de l’épanouissement individuel jusqu’à l’obsession, la sexualité frénétique (mais aujourdhui coupée de sa finalité de procréation), que l’on constate dans nos sociétés, riches et nanties, et aussi leur infécondité, rappellent quelque part ces plantes trop bien nourries, trop belles, aux larges feuilles vertes et épanouies, …, mais qui n’arrivent plus à donner de la semence.
Une alimentation bien réglée favorise l’émergence des activités supérieures. La nourriture épuise l’énergie vitale au lieu de la reconstituer, la part utilisable pour d’autres activités (reproduction pour les plantes, reproduction et mouvement pour les animaux, reproduction mouvement et vie spirituelle pour les hommes diminue).
L’attachement aux biens matériels, au delà du nécessaire, ne crée pas le bonheur pour les personnes, nous le savons. Il faut bien prendre conscience aussi que ce dérèglement entrave le processus de vie lui même, que ce soit physiologiquement chez tous les êtres vivants, plantes ou animaux, et spirituellement chez les humains, avec des conséquences sociales.
Le chemin de vie est dans la pauvreté, c’est à dire le minimum des besoins satisfaits, sans les excès du luxe. Dans la pauvreté en esprit, c’est à dire le non attachement aux biens matériel. C’est cette voie qui permet à la fois le vrai bonheur de l’homme, et sa descendance.
« Heureux les pauvres … », nous dit le Christ, lui qui est la Voie, la Vérité, la Vie
(*1) On pourrait objecter que certaines familles aisées, ont encore beaucoup d’enfants, en France en particulier. C’est exact, et fort encourageant, mais regardons bien qui sont ces familles aisées et qui continuent à être fécondes : très souvent des familles avec des valeurs religieuses profondes et sincères, et qui appliquent justement la pauvreté en esprit … préconisée par le Christ. Sachant évidemment que beaucoup de familles nombreuses sont pauvres parce que nombreuses justement
(* 2) Voir sur ce point l’étude passionnante de X. Martin, Voltaire méconnu, DMM 2006.
(*3) Avec sans doute un ensemble de causes diverses allant de l’exposition aux radiations d’un environnement "moderne" (en particulier le "canon" d’une télévision couleur) à la disparition des cadres sociaux stables rendent l’aventure de la maternité et de la paternité de plus en plus risquée en passant par une alimentation de plus en plus artificielle.