Billet spirituel - Juin 2022

Mardi 14 juin 2022

Espérer contre toute espérance

Nous vivons des temps difficiles et nos espoirs humains sont déçus, nos espoirs de paix avec la guerre en Ukraine, nos espoirs d’un changement politique en France avec les dernières élections, et nous sommes encore marqués des séquelles sociales du Covid et de sa gestion politique et médiatique. Pendant ce temps, la crise écologique s’accentue, la sécheresse devient pour tous une réalité préoccupante. Comment croire encore en l’avenir humain ?

La tentation se fait forte de tomber dans l’apocalyptique : nous sommes cette fois-ci pour de bon dans la fin des temps. C’est une lecture possible, ce n’est pas la première fois que nous pouvons lire des signes de fin des temps, et effectivement, un jour, ce sera vrai.

Mais la question est de savoir ce qu’il faut faire quand arrive la fin des temps. Le saint continue de faire ce qu’il était en train de faire. Il n’a rien à changer à son « programme ». À Jean Bosco qui demandait à Dominique Savio pendant la récréation : « que ferais-tu si le Christ devait venir dans 5 minutes ? », le jeune enfant répondait : « je continuerai à jouer avec mes camarades ». On n’est pas obligé de faire d’un jeune saint un docteur de l’Église. Mais il me semble que le critère d’une bonne attitude face à l’interprétation apocalyptique des temps que nous vivons est bien celui de l’espérance.

L’espérance continue d’agir alors qu’il n’y a plus de raison d’espérer, alors qu’on ne voit pas ce que cela va changer, ni à l’échelle de la planète, ni à l’échelle de notre pays, ni même peut-être à l’échelle de notre famille1. L’espérance permet de continuer à choisir le meilleur, de s’ajuster le mieux possible à la volonté de Dieu et à son appel, qui est toujours le même, quel que soit le temps : « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».

Si les considérations apocalyptiques nous poussent à chercher un refuge loin des autres, nous replient sur nous-mêmes, nous conduisent à baisser les bras dans notre prédication de la bonne nouvelle en paroles et en actes, nous coupent les ailes, nous empêchent d’entreprendre et d’être responsables, alors elles ne sont pas chrétiennes.

L’apocalypse n’a pas été écrite pour désespérer les fidèles, mais au contraire, pour rallumer le zèle des églises, redonner élan et flamme à leur prière, à leur désir du Christ, désir de son retour, certes, mais surtout désir de son Royaume, désir de laisser advenir déjà, là et maintenant, ce Royaume, d’être bonne terre pour accueillir la semence du Verbe, désir de vivre déjà la résurrection, de vivre dès maintenant en communion avec le Christ vivant.

Fr. Jean-Etienne Long, o.p.

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