Billet spirituel - Mars 2021

Vendredi 9 avril 2021

Notre terre a donné son fruit

"Dominus dabit benignitatem, et terra nostra dabit fructum suum, le Seigneur a accordé sa bonté, et notre terre a donné son fruit.« (Psaume 84, verset 13). Alors que nous, paysans, travaillons avec acharnement pour faire donner son produit à la terre, pour beaucoup d’entre nous en effet, qui en sommes aux semailles de printemps, voici que la parole de Dieu, par la voix du psalmiste inspiré, nous dit que cela est déjà fait : » notre terre a donné son produit ". Comment comprendre ?

Il faut semble-t-il d’abord préciser le vocabulaire. Que veut dire exactement le mot « terre » ? Il peut avoir plusieurs sens selon le contexte de son emploi. Ce peut être le matériau : on dira qu’une cruche est en terre (cuite) pour dire qu’elle n’est pas en verre ni en porcelaine ; ce peut être aussi les zones sèches de notre planète opposées aux parties qu’occupent les mers et les océans, on parle alors de la « terre ferme » ; ce peut être l’ensemble de notre planète par rapport aux autres astres : la terre n’est pas la Lune ni Mars. Dans le domaine spirituel, la terre désigne le monde physique où nous vivons présentement, contre-distinguée du monde des esprits où se déroulera notre vie future au ciel. Tous ces sens du mot « terre » sont présents dans la Sainte Écriture. Ce sont les deux derniers qui concernent le verset du psaume que nous étudions.

En quoi notre terre a-t-elle donné son fruit ? L’Église le comprend d’abord par l’incarnation. La seconde personne de la Sainte Trinité, le Fils, le Verbe, s’est fait chair, et a donc pris, comme nous-mêmes, une humanité tirée de la glaise du sol, comme dit le récit du livre de la Genèse. Et il est issu de ce que notre Terre contenait de plus digne de Dieu, le sein de la très pure Vierge Marie, cette unique personne humaine à n’avoir pas été contaminée par le péché originel. Dans la prière du « Je vous salue Marie », nous invoquons Jésus comme « le fruit de ses entrailles ». Le prophète Isaïe avait comparé Jésus au rameau qui pousse, et la Vierge Marie à la tige sur lequel il pousse.

Notre terre a donné un fruit peut-être plus excellent encore lors de la résurrection de Jésus lorsque celui-ci ressort du tombeau dans la condition de la vie céleste avec un corps glorifié. Et là, c’est Jésus lui-même qui avait parlé de la terre pour annoncer l’événement : "Comme Jonas était resté trois jours dans le ventre du monstre marin, réplique-t-il à des docteurs de la Loi qui voudraient exiger de lui un signe miraculeux, le Fils de l’Homme restera trois jours dans le ventre de la terre".

Peut-être ferez-vous l’objection que cela est bien beau mais n’avance pas beaucoup le travail agricole ? Cela en tous cas l’ennoblit considérablement en lui donnant une finalité bien plus haute que la seule production de denrées comestibles. Une si haute perspective fait entrer notre travail dans le grand mouvement du plan divin dont le but consiste en "les cieux nouveaux et la terre nouvelle « , lieu de vie dans lequel Dieu »sera tout en tous« , comme dit saint Paul, Dieu qui, dès maintenant »fait lever son soleil sur les méchants comme sur les justes« , qui fait en sorte que »la pluie et la neige qui descendent du ciel n’y remontent pas sans avoir donné au semeur ce qu’il faut pour faire germer, et le pain à celui qui récolte", autre prophétie qui annonce les temps nouveaux.

Ce sont tous ces fruits, dont les résultats matériels de nos récoltes sont comme le signe et le gage que nous demandons au Seigneur durant ce temps du Carême, que je vous souhaite fervent et fructueux.

Un moine de l’Abbaye de Randol

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